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Tchad, Victime de l’Agoraphobie et de la Versatilité de ses Acteurs Politiques

 

Depuis que le Soudan et le Tchad ont décidé d’enterrer leur hache de trucidement par procuration, au détriment de leurs poulains respectifs (rébellions armées tchadiennes de l’est et éléments du MJE), le langage des armes et de la « résistance » a fait place au langage de (re)construction nationale, de retour au bercail et de développement économique du pays, etc. Pour certains Tchadiens, et surtout leur président Idriss Deby, l’annonce et le scellement de cet accord semblent résoudre à jamais le problème des rébellions de l’est du Tchad. Et par ricochet, cela doit attirer les migrants Tchadiens vers leur pays d’origine. Soit ! Mais nous sommes encore loin de la matérialisation concrète de ces idées ou discours.

Car les dires et comportements, et du président Idriss Deby Itno et des « chefs de rébellions  armées» de l’est, ainsi que leurs relais de bloggeurs sur le Net au sein de la diaspora, n’augurent aucun lendemain meilleur pour la paix et la réconciliation nationale au Tchad. Tout le monde semble duper la conscience collective et nationale des Tchadiens en émettant et produisant des discours, communiqués et articles contraires à l’esprit patriotique et nationaliste qu’on veut faire croire à la communauté politique nationale et internationale à travers ces luttes purement politico-ethno-gastronomiques. En un temps deux mouvements, et communiqué après communiqué, les rebelles tchadiens annoncent qu’ils sont pour le dialogue, sont prêts à déposer les armes, veulent négocier avec le pouvoir, ne veulent plus de négociation avec les envoyés du pouvoir MPS, et enfin décident d’aller en guerre jusqu’au déboulonnement total de la dictature de N’djamena. Et malgré les supercheries des uns et les leurres d’une victoire militaire chez les autres, les media tchadiens (surtout les Blogs) n’arrivent toujours pas à cerner le Ying et le yang  de la politisation ethnique du pouvoir d’état au Tchad afin de créer un espace de dialogue et d’osmose salutaires au sein des populations tchadiennes.

Ainsi, Deby claironne sa victoire sur les rebelles et joue la prolongation en tout pour se maintenir au pouvoir. Les rebelles ou politico-militaires, quant à eux, misent encore sur des éventuels sponsors et vendeurs d’armes pour déstabiliser le Tchad (eh oui) et non le pouvoir de Deby. Cependant, la versatilité des exigences, réclamations, positions et participation ou non des rebellions armées aux négociations de paix témoigne-t-elle qu’il y a bien défaillance au sein de la « Résistance Nationale/Armée ». Malgré tous ces manquements politiques des « libérateurs », les bloggeurs tchadiens (rédacteurs en ligne) - activistes, partisans, résistants ou martyrs etc. affichent et truffent des articles de velléités qui sapent la bonne conscience et lutte des Tchadiens sérieux du devenir de leur pays. Je ne doute pas de la capacité des rebelles tchadiens à « faire partir » le président Idriss Deby un jour. Mais somme toute faite, après ces criardes défaites et débâcles aux portes de N’djamena sur fond de milliers de jeunes morts, n’est-il pas temps de « changer de fusil d’épaule » ?

En fait, les blogs traitent leurs sources d’information comme des ragots et aiment se verser dans le sensationnel au lieu d’informer objectivement.  Pour ce faire, il y a un problème notoire d’éditorial, de cadrage et d’orientation d’information au niveau des blogs tchadiens pour arriver à une formation civique, politique et citoyenne des Tchadien(ne)s pour apporter le changement politique tant voulu au pays. Le changement est un processus qui demande une préparation et planification, voire une certaine pression et tension bien mesurées pour y aboutir. Mais, au Tchad, on veut apporter ce changement politique par des rancœurs, des haines gratuites et surtout par des délations et assassinats de caractère etc. On fouine dans les caleçons, tiroirs, casseroles et passés d’autrui pour justifier sa petite rancœur inouïe. Il n’y a qu’à parcourir les blogs tchadiens pour voir comment on assassine les noms des ethnies et les caractères des individus qui ont des opinions contraires à celles des « sauveurs » du Tchad ou autres webmasters. Cela n’est qu’un constat ! Car l’information est une nourriture indispensable de nos jours, mais elle peut être aussi un poison quand c’est difficile à digérer. Alors il est écrit quelque part que « La liberté de la presse est un droit. L’obligation c’est la responsabilité ».

En effet, il y a une crise de confiance et de prise de conscience sérieuse dans toutes les entités qui composent ce que nous reconnaissons ou voulons nier l’existence comme nation tchadienne. Qu’on le veuille ou non, il y a un territoire légué depuis le 11 aout 1960 par les colons Européens (ah oui !) aux hommes et femmes qu’ils y ont rencontré et ont confié la responsabilité: le Tchad. Et Deby ne cesse de le dire à qui veut l’entendre qu’il est du devoir et responsabilité des Tchadien(ne)s de construire leur pays. Mais les Tchadiens, eux, au contraire, croient naïvement que Deby est là pour construire à leur place ou leur céder son fauteuil « en douceur ».

Le hic est que comme le mythe autour des ancêtres Sao n’a pas pu rassembler et unifier les habitants de ce territoire (Tchad) et leurs nombreuses descendances, la méfiance a pris la place de l’harmonie et de la cohésion sociale qu’on cherchait à asseoir à travers ce mythe. Et de là, la désintégration du Tchad en tant que nation s’apparente à l’histoire de la Tour de Babel ou chacun parle son langage sans considération et écoute de l’autre. En plus, si l’harmonie nait de la différence, ou bien qu’il n’y a d’harmonie que dans la différence, au Tchad, la différence crée (toujours) de la cacophonie et non de l’harmonie.

Il n’y a qu’à observer les interactions entre politiciens, militaires, ethnies, villages, populations, intellectuels, étudiants, fonctionnaires, diplomates tchadiens etc. pour s’en convaincre. Le Tchadien trouve l’autre gênant même s’ils se disent frères ou compatriotes. La peur de dialoguer et de discuter franchement de l’avenir et du devenir du pays est bien encrée en chacun de nous. C’est depuis presque 30 ans qu’on nous parle de retrouvailles, de réconciliation nationale, de table-ronde, de dialogue inclusif etc. mais tout cela est occulté par pure sottise, frousse ou égoïsme des acteurs politiques, leurs acolytes ou parrains de tout bord. Ainsi, le Tchad continue-t-il d’être victime de l’agoraphobie de ses propres enfants, acteurs politiques et politico-ethno-rebelles.

Du dialogue national inclusif, nous voici à la porte de la migration et du rapatriement volontaire des rebelles et Tchadiens de la diaspora pour amorcer le développement durable au Tchad. A qui profite cette diversion ? C’est dire que le dialogue national réclamé à cor et à cri par la communauté politique tchadienne jusqu'à une date récente, pour réconcilier les uns et les autres, a fait place à une autre mouche dans la case socio-politico-ethnico-militaire des Sao. Mais pourquoi assistons-nous à ce regain d’intérêt pour les migrants et politico-militaires tchadiens (ou forces de la « Résistance Nationale ») comme des entités capables d’apporter leur contribution ou d’opérer un changement socio-économique au Tchad ? La diaspora tchadienne ou communauté des migrants tchadiens a toujours existé depuis le début de la politisation ethnique du pouvoir d’état au Tchad. Il y a même un texte régissant les Tchadiens de l’étranger qui souffre dans les tiroirs aux Affaires Etrangères à N’djamena ! Et les politico-militaires ont toujours demandé un dialogue inclusif pour faire la paix avec le régime en place. Mais rien ! Qui a peur de quoi alors ??

Le pouvoir de Ndjamena veut-il se faire une nouvelle image en cherchant à créer une osmose entre lui, la diaspora et les politico-militaires ? Je doute fort bien ! Il n’y a pas de politique sans un idéal, disait quelqu’un. De Montréal en passant par Washington DC et Dakar, Deby ne cesse de claironner que son Tchad est en chantier et qu’il a besoin des bras des Tchadiens de l’étranger pour y arriver. Faire de la politique c’est appliquer un programme, monsieur le président ! Or le gouvernement tchadien actuel n’a aucun programme pour appuyer ses balivernes d’appel au rapatriement volontaire des migrants tchadiens pour contribuer au développement du pays. Y- a-t-il de mesures d’accompagnements pour ceux qui veulent rentrer que j’ignore ? Pourquoi demander aux politico-militaires/rebelles de rentrer au bercail alors qu’on n’entend pas négocier avec eux, ni penser aux solutions de leur réinsertion ? Est-il raisonnable qu’Idriss Deby claironne à qui veut l’entendre qu’il n’a pas d’argent à distribuer aux rebelles ? Prise de conscience ou fermeté politique ? Est-il déjà fatigué de semer l’argent à tout vent pour sauver sa vie ou son fauteuil présidentiel que de le faire pour la paix au Tchad ? Pourquoi les rebelles déconnent de négocier leur réinsertion quand ils peuvent s’organiser pour coincer soit le président Deby, El-Béchir ou l’Union Africaine à accepter leurs doléances de dialogue inclusif ou réinsertion négociée ? Est-ce toujours de l’agoraphobie chez les rebelles tchadiens ou simple haine de ne pas voir le dictateur de N’djamena avant sa chute ? Saluons au passage tous ces fils du Tchad qui ont pris courageusement la décision politique de regagner le pays après réflexion et analyse de leur lutte politique surannée. Combien de vies sont-elles sauvées à travers leurs gestes de rentrer au pays malgré les « réalités tchadiennes » du terrain et l’opposition inepte des éternels va-t-en guerre ?

Les haines ethniques et tribales gratuites ou savamment orchestrées par les dirigeants tchadiens, les rebelles et le clan du président Idriss Deby autour du pouvoir d’état depuis 20 ans ne permettent pas de retrouver facilement la paix et la cohésion sociale au Tchad. Le faux, le mensonge et la délation sont érigés en vertu chez des jeunes tchadiens. La collaboration est inexistante entre Tchadiens de différentes couches sociales, de différents partis politiques et de différentes régions etc. à cause de cette agoraphobie créée en eux par des gens malintentionnés et en mal du pouvoir d’état au Tchad. Il est du devoir de la presse tchadienne en ligne et des Tchadien(ne)s soucieux (ses) de leur pays de contribuer par des réflexions saines, sans haine ni rancune pour assurer la formation citoyenne de la génération montante.

Parlant de réflexion et d’information, il y a trop de rétention d’information et de réserve chez certain(e)s Tchadien(ne)s. Ils préfèrent les coulisses que la place publique. C’est beau de critiquer et « d’insulter » le régime de Deby comme toute dictature sur terre. Mais les insultes ne vont pas faire partir Deby !! Ce sont les déboires politiques de Deby présentés avec preuves à l’appui qui feront un jour chuter son régime. Et les déboires politiques de Deby ne manquent pas. Cependant les Tchadiens ne sont jamais arrivés à exploiter ces situations. Ils se cantonnent à compter les nombres de bouteilles de whisky que le président Deby casse à seul, les nombres de femmes qu’il change, ou bien les jours qui lui restent à vivre. Sur ces faits précis, l’homme le plus informé sur Deby et son régime à Tchadactuel.com pourrait rendre un grand service au peuple tchadien en dosant ses « brèves de N’djamena » de bonne foi même si ses sources ont parfois capté l’information derrière le secco.

Comme l’a si bien reconnu et écrit cet ainé, « La tâche des intellectuels est de produire des cadres d’analyse et des concepts pour rendre intelligible et maîtrisable ces ruptures qui paraissent relever d’une certaine « folie » de l’Histoire. » (Source: Tchadactuel.com 13/04/10). La haine politico-ethnique au Tchad a trop duré pour continuer après le 50ème anniversaire de l’indépendance de notre pays. Et la vraie folie de l’histoire politique du Tchad c’est cette peur insensée qu’a le Tchadien de parler de son pays ou dialoguer avec l’autre pour boire ensemble un jour le calice de paix et de réconciliation nationale. L’agoraphobie est un état psychologique qui peut avoir une solution thérapeutique. Alors, d’ici là, abandonnons nos petites haines et querelles mesquines pour répondre massivement à l’invitation de S.E Acheikh Ibn-Oumar de chercher à « définir des modalités d’action et d’organisation politique de type nouveau, basées sur des forces nouvelles, animée par des idées novatrices » (Source : Tchadactuel.com 13/04/10). Le salut du Tchad interpelle nos consciences après ce demi-siècle de peur et de haine gratuites entre nous.

Pour ma part, les héros dans cette folie de l’histoire politique du Tchad sont bien les fonctionnaires de létat, les paysans et nos pauvres parents qui, malgré les canons des autres qui les déciment, continuent à travailler pour maintenir le pays débout, produisent à manger, et économisent pour nous envoyer à l’école etc. Ce sont ces efforts qui permettent aujourd’hui au gouvernement tchadien de claironner son projet de développement du Tchad, pas son pétrole. Et au lieu de récompenser les efforts de nos parents et fonctionnaires tchadiens en doublant leurs salaires, le gouvernement préfère plutôt développer les ventres de ses ministres et compagnies. Vu ces situations décourageantes de la part du gouvernement, des rébellions et acteurs politiques, les populations tchadiennes de l’intérieur n’ont pas tort de composer aujourd’hui avec « le diable » qu’elles connaissent mieux en attendant l’apparition des vrais « libérateurs-saveurs » du peuple tchadien dans son ensemble.

 

Par : LAOUNODJI M. MONZA
Washington DC, USA

E-mail: laoumonzal@yahoo.fr

Tag(s) : #Ambénatna
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