L'union des forces de la résistance (UFR) a pris le temps qu'il faut pour mettre en place son bureau politique. L'état major militaire quant à lui se fait toujours désirer.
Depuis plusieurs semaines déjà, Monsieur Timane Erdimi trône à la tête de l'UFR même si la réalité du pouvoir semble encore virtuelle à ce stade. Par exemple, Monsieur Timane est « obligé » d'adopter un profil cool, une attitude très courtoise envers ses homologues et les autres ténors de la rébellion.
On assiste depuis à la gestation d'un autre Timane, avec des sourires larges, des gestes amicaux, d'écoute attentive et de disponibilité permanente. C'est presque le contraire de ce que nous avons connu jusque-là en bientôt 4 ans de dissidence. Mais bon, c'est la politique et surtout à chacun son style de management des hommes. N'oublions pas que certains leaders de la rébellion de l'Est n'ont pas encore dit leur dernier mot. Même s'ils n'affichent pas clairement leurs intentions, ils les dissimulent difficilement.
Parmi eux, relevons que Monsieur Hassaballah Soubiane reste catégorique sur sa position anti-Erdimi. Il adhère à l'UFR et à la lutte armée contre le régime abominable d'Idriss Deby Itno, mais ne cautionne point de mettre ses hommes sous la tutelle d'un Erdimi. Une position, même si elle est critiquable, a le mérite d'être honnête et sans ambiguïté.
Monsieur Soubiane sait ce qu'il fait car il a l'histoire avec lui. Il reste à ce niveau pratiquement le seul témoin oculaire du congrès de Bamina qui a porté Idriss Deby à la tête de la coalition anti-Habré, le MPS, sur injonction des Soudanais. Soubiane connait aussi bien que ses autres frères, la trahison de Deby soutenu par ses frères Zaghawas qui ont mis le Tchad en ruine. Soubiane a t'il raison de redouter que les 18 mois de transition accordée à Timane se transforment encore à un autre 18 ans de cauchemar vécu sous Deby ?
C'est incontestablement une hypothèse plausible, qui n'est donc pas à écarter. Bien au contraire, elle mérite attention et vigilance. En politique, il n'y a point de promesses. Une fois installer au palais rose, toute la racaille actuelle de Deby habituée à des fastes mondaines se réfugiera derrière le Président Timane Erdimi pour continuer le festin. Le MJE ne se fera pas prier pour faire allégeance au nouveau roi des Zaghawas car sa survie en dépendra. Il est presque certain que Timane ne crachera pas sur ces mains tendues, bien qu'elles soient souillées du sang de sa famille. C'est encore la politique vous dirais-je !
Maintenant, si vous ajoutez à tout cela les manœuvres françaises et libyennes, vous comprendrez aisément qu'on risquerait de faire un grand bond dans le passé pour retrouver les années 79-80. Pour cette génération qui frôle aujourd'hui la trentaine et qui, certainement, n'a pas une idée réelle de la situation de l'époque, il faut simplement imaginer que la capitale N'djaména et les principales villes de l'intérieur du pays soient partagées entre les différentes factions militaires qui imposent leur autorité et se surveillent mutuellement. L'Etat, déjà moribond aujourd'hui, ne contrôlera pas grand chose, pour ne pas dire cessera d'exister. Dans ce contexte, tous les dérapages sont possibles.
Il convient donc de comprendre les réticences de Monsieur Hassaballah Soubiane qui opte pour un changement radical. Le régime actuel doit être éradiqué de sa racine et cela ne serait pas possible avec un Timane Erdimi au sommet de l'Etat, même temporairement, il y a des risques d'attirer les mêmes mouches.
En définitif, il revient principalement au Général Mahamat Nouri de l'UFDD et au Colonel Adouma Hassaballah de l'UFCD, dont l'effectif des troupes font pas moins de 85% de l'UFR, d'être vigilants et de veiller à ce que les ennemis d'hier ne s'abritent pas derrière le RFC et se retrouvent tranquillement à N'djaména avec armes et bagages.