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masque.jpgFace aux difficultés multiples à remplir quotidiennement leurs missions premières; celle d'informer et rien qu'informer, les journalistes Camerounais pour la plus part sont coincés dans un labyrinthe à l'instar de la peur du système, du manque de sérieux, de clientélisme, etc. Le monde de la presse dans notre pays a encore du chemin à faire.


En ce jour, 03 mai 2011, journée mondiale de la liberté de la presse, c’est peut-être le moment de se revoir dans un miroir vu au prisme de la réalité quotidienne la situation dans laquelle fonctionnent nos professionnels de la plume.


Bien que les lois accordent un certain pluralisme de l'information, on assiste toutefois, ces dernières années, à une nette détérioration de la situation de la liberté de presse et des conditions de travail des journalistes dans ce pays voisin du Tchad situé en Afrique centrale.

Les professionnels des médias dénoncent, en particulier, leur situation sociale qu'ils jugent préoccupante. Ils parlent d'atteinte grave à leur évolution caractérisée, au plan social, par une absence de lois qui protègent leur carrière. Une insuffisance que certains journalistes qualifient de "vide juridique".


L'institution du contrat de travail y est galvaudée. Il n'en existe pas souvent ou presque. C'est également le cas d'institutions obligatoires comme les bulletins de salaires, les congés annuels, la couverture sociale et la retraite. Les autres dispositions légales relatives aux accidents de travail, aux maladies professionnelles et autres risques du métier sont ignorés.

Il en est de même de l'observation du temps hebdomadaire du travail, de la rémunération du travail de nuit ou de la récupération des week-ends et jours fériés.

La presse camerounaise se montre peu favorable à toute organisation moderne du travail. La formation professionnelle continue, connue sous d'autres cieux, est réservée au bon vouloir du directeur de publication qui, à défaut de proposer les mieux servants de ses employés, se forme lui-même à tous les coups bien que n'ayant pas d'apport réel dans les colonnes. Comités d'entreprises, représentants syndicaux et délégués du personnel sont méconnus. On risque le licenciement en faisant le syndicaliste.


Dans cette presse, des pratiques anti-journalistiques se sont instaurées pour arrondir les fins de mois. C'est le cas du gombo et du « journalisme du Hilton » ou de la « Rue Mermoz » qui naissent des conditions de vie et de travail misérables dans la centaine de titres que compte la presse locale.


Le gombo, phénomène fort célèbre au Cameroun, réputé pour sa corruption, est une pratique consistant pour un informateur voulant manipuler l'opinion en sa faveur, à devenir, contre de ridicules subsides, un commanditaire de la publication d'une information qui ne sera pas recoupée pour les besoins de la cause. Le phénomène consacre en fait une forme de mendicité du journaliste.


"Exercer la profession de journaliste, au Cameroun, relève d'une mission difficile, car tout se passe dans un environnement de pauvreté absolue où les acteurs finissent parfois clochardisés : c'est un autre monde",insinuait récemment sous le couvert de l'anonymat, un membre du Syndicat national des Journalistes du Cameroun.

Certains analystes estiment, toutefois, qu'il est impérieux d'assainir le milieu de la presse afin d'aider les professionnels des médias à impulser une réforme de leur profession capable de créer davantage de richesses et de réduire la pauvreté dans leurs rangs.

Licenciements abusifs à la pelle.

Au plan social, plusieurs dizaines de journalistes ont été licenciés abusivement au Cameroun depuis plusieurs années. Ils n’ont guère bénéficié d’une aide judiciaire. Seul le président du SNJC et son collègue Gilbert Tchomba y ont eu droit par exemple en 2006 lors de leur licenciement.

Aucune manifestation de solidarité véritable de leurs collègues n’a été relevée, conséquence du déficit de culture syndicale. De même, la justice camerounaise, corrompue, n’a jamais traité les cas sociaux avec la célérité qu’exige la doctrine. Cette situation est souvent aggravée par la tendance à la rivalité inutile tous azimuts des organisations professionnelles de l’échiquier, déstructurées, mais uniquement soucieuses de préséance auprès des bailleurs de fonds.

Plusieurs d'entre eux se trouvent en prison ou menacés d'être emprisonnés au Cameroun. L'on a aussi assisté l'année dernière au décès d'un directeur de publication à la prison de Yaoundé.

Selon Emmanuel Mbiedi, chroniqueur à l'hebdomadaire la République, cette affaire est révélatrice de la situation des journalistes au Cameroun. Il dénonce une « instrumentalisation de la justice pour mettre les journalistes hors d’état de nuire, à un moment crucial de la vie politique nationale ».

Que dire des chasseurs d'argent ?

Chasseuses d’argent dans les ambassades, organisations internationales et entreprises, ces « confrères et consoeurs » sans conviction syndicale font feu de tout bois, y compris la compromission aveugle avec les patrons les plus délinquants et les autorités, pour se donner de la prépondérance. Ce schéma renforce la psychose généralisée du licenciement abusif avec son lot de déni de droit ; elle renforce auprès d’un certain public de confrères l’idée d’un patronat « qui contrôle toute la situation ».

L’on peut toutefois affirmer que, depuis le deuxième trimestre 2007, la situation s’est légèrement améliorée suite aux multiples assauts du (seul) SNJC contre les patrons indélicats, lesquels ont fait l’objet de dénonciations systématiques relayées dans les médias.

En dépit des bas salaires, de l'absence d'équipement, des terribles conditions de travail, du harcèlement des officiels et d'autres maux chroniques, les journalistes camerounais essaient de faire leur métier. Quiconque est tenté de pester contre un titre ou des phrases mal écrits devrait s'en rappeler. Car le fait même que ces journalistes essaient de faire de leur mieux est déjà admirable. Et ils font chaque jour un peu mieux. Les journalistes survivent à cet enfer parce qu'ils aiment leur métier.

Cette journée du 3 mai 2011 devrait être une journée de remise en question à la fois chez les patrons des journaux Camerounais et des journalistes qu’ils emploient. Une manière de remettre sur la sellette la problématique de l’emploi de ceux qui chaque jour font frémir ceux qui pensent à un changement véritable au Cameroun.

Hugues SEUMO

Tag(s) : #Question sur l'Actualié
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