Après les hésitations des puissances occidentales à prendre des mesures radicales contre Gadafi, les sanctions onusiennes paraissent, en définitive, métaphysiques au regard de la sanglante réalité que vivent les populations de Libye. Le minimum aurait été de couper tout lien diplomatique avec le régime Gadafi afin qu’il comprenne qu’il n’a plus aucun avenir politique et renonce à résister à l’ire populaire. Le peuple libyen serait réconforté dans sa légitime révolte. Je veux dire dans sa révolution historique !
Le silence pusillanime de la quasi totalité des chefs d’Etat africains, comme si Gadafi ne pouvait pas être délogé, face aux évènements sanglants de Libye, tendrait-il à dire « même mort, le léopard a toujours la peau tachetée » ? Et la peur de la plupart de nos roitelets est double : appréhension de la contagion et crainte de représailles si jamais… Mais ne voient-ils pas que le peuple libyen vient montrer à suffisance que ce léopard là est en argile.
Quid des fameux mercenaires subsahariens, en particulier tchadiens, dont on parle tant ? La mauvaise querelle qui entoure cette histoire dérape en conjecture comme dans toutes les affaires tchadiennes.
Des sources souvent biens renseignées sur certains faits et gestes « débyens » donnent même des noms, aussi bien de ceux dépêchés depuis le Tchad que de gens chargés de recruter des tchadiens dans les villes libyennes où il y a un Consulat tchadien.
Oui, c’est vrai qu’il y a des libyens noirs qu’on peut confondre avec d’autres africains. D’ailleurs, les deux plus grandes tribus noires de Libye (les Toubous et les Touaregs) ont annoncé leur ralliement aux insurgés. Il y a aussi quelques autres minorités noires de la région de Sebha.
Qu’il y ait des « mercenaires noirs » dans les légions de Gadafi n’est plus à démontrer. Qu’il y ait des tchadiens parmi eux n’est plus à prouver non plus.
Bien entendu, le gouvernement tchadien ne viendra jamais reconnaître avoir envoyé ou recruté des mercenaires. C’est vrai que l’organisation du transport de soldats à partir N’Djaména ne peut passer inaperçue, particulièrement pour certains observateurs. D’où la pertinence de la question écrite du député français Gaëtan GORCE au Ministre français de la Défense.
Alors doit-on croire que ceux qui démentent en lieu et place du gouvernement craindraient des représailles contre les immigrés tchadiens ? C’est faire peu de cas d’un peuple qui a bravé justement la machine de répression de Gadafi, cette même machine qui a monté les expéditions punitives et les massacres de triste mémoire des africains noirs en LIBYE. On se souviendra qu’à l’époque, les Ministres Tchadien et Libyen des Affaires Étrangères annonçaient de concert qu’il n’y aurait eu « que deux tchadiens tués ».
En tous cas, les quelques compatriotes que nous avons pu joindre et qui disent être en contact avec d’autres tchadiens (le tout ne constituant sans doute qu’une petite minorité) nous ont dit à peu près ceci : « nos employeurs nous protègent, certains sont hébergés par leurs patrons, mais nous évitons de sortir des maisons car il semble qu’il y ait des tchadiens et des soudanais dans les forces de Gadafi ».
Pourquoi se perdre en conjecture si et puisque la victoire du peuple libyen est certaine et qu’elle apportera des réponses à toutes les interrogations ?
Qui ignore qu’Idriss Déby ne peut rien refuser à Gadafi et que de ce fait il ne peut être lavé d’aucun soupçon ?
Il ne peut non plus être innocenté de la suspicion de préparer une répression aveugle sur les populations tchadiennes si les résultats truqués des législatives annoncés cette nuit étaient contestés d’une manière ou d’une autre par les électeurs.
Le MPS s’est octroyé sans vergogne 134 sièges sur 180 au premier tour !
Et les instructions aux gouverneurs, préfets et commandants militaires de Moundou, Sahr etAbéché, sont formelles : réprimer sans pitié toute contestation. « de N’Djaména la vitrine je m’en occuperai personnellement aurait-il ajouté.
Il est vrai que la contestation et la réaction des électeurs dépendent surtout des chefs de partis et des candidats eux mêmes. C’est à désespérer.
A désespérer car celui qui a donné un satisfécit au déroulement, pourtant scandaleux, de ces élections n’est autre que celui-là même qui avait forcé la main en 2007 aux différents partis de l’opposition pour signer le fameux Accord du 17 Août ; j’ai nommé l’Euro Député Louise MICHEL, Commissaire Européen à la Coopération à cette époque. La politique européenne à l’époque et encore maintenant consiste à assister les dictateurs qu’ils se sont choisis à « stabiliser le pouvoir » et/ou « barrer la voie aux islamistes ».
Pour cela et malgré des violations criardes de cet accord, et les provocations comme les résultats des législatives données cette nuit, par la partie gouvernementale, timidement dénoncées par les membres de la CPDC, les parrains dudit accord ont pressé les chefs des partis à composer avec Idriss Deby parce qu’il ne peuvent admettre l’échec de ce qu’ils ont échafaudé dans leurs bureaux de Bruxelles.
C’est ainsi que certains sont passés de l’“opposition” à la majorité gouvernementale et ont même fini par intégrer le gouvernement. De plus il y a parmi eux de véritables transhumants qui en sont à leur énième alliance avec le MPS, de véritables garçons de courses de Idriss Déby, plusieurs fois Ministres, voire Premiers Ministres. Sans compter les faire-valoir passés et futurs de la super mascarade des présidentielles.
Depuis février 2008, le Ministère de la Justice a eu au moins deux titulaires membres de la CPDC, mais aucun n’a eu le courage de faire avancer ne serait-ce que d’un saut de puce le dossier sur la disparition du Pr Ibni Oumar Mahamat Saleh.
Attendre de ces chefs de partis qu’ils chassent Idriss Déby, c’est comme attendre des animaux d’un cirque qu’ils agressent leur dompteur. Ils sont dressés pour réagir et obéir au fouet de leur dresseur.
Et voilà queles résultats des législatives sont donnés comme pour les narguer!
Il ne reste plus que le réveil du peuple et de sa jeunesse pour prendre leur destin en mains , résister et dire non à la forfaiture.
La complaisance toute paternelle des puissances occidentales envers toutes les dictatures vraies qui sévissent en Afrique invoquant la stabilité doit cesser. Les pays occidentaux doivent entendre et écouter les voix qui s’élèvent des déserts, des savanes et des forêts africains avant qu’elles n’emportent leurs valets, particulièrement les suppôts d’une certaine FrançAfrique.
Après Ben Ali, Hosni Moubarak ; et bientôt Gadafi. A qui le tour d’après ? La suite peut être encore plus déroutante pour la diplomatie des grandes puissances.
Qui saurait dire aujourd’hui où s’arrêtera la lame de fond partie de Sidi Bouzid ?
Merci aux peuples arabes africains pour leur leçon de courage.
Merci au peuple tunisien pour sa révolution permanente.
Merci au peuple égyptien pour son édifiante ténacité.
Merci au peuple libyen pour sa témérité exemplaire.
Peuples et citoyens opprimés de toutes les dictatures, réveillez-vous!
Adoum YACOUB KOUGOU