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Vingt sept ans après sa brutale éjection de la scène politique Tchadienne par Hissein Habré trop pugnace et plus fort que lui avec le soutien populaire contre l’occupation du Tchad par la Libye, voilà Goukouni Weddeye, éphémère président de la République et non moins occasionnel chef de guerre, qui revient avec fracas au pays. Et quel retour ! Après un exil plus ou moins doré en Algérie, l’ancien guérillero aux cheveux plus sel que poivre s’est trouvé propulsé sous les spots de la plus brûlante actualité :  tous les journaux, et même RFI, n’en ont que pour lui, et s’extasient littéralement du fait que l’ex président du GUNT ait été reçu dans la foulée de sa descente d’avion par Idriss Deby Itno au Palais rose.

Ce retour – il faut le dire un peu trop médiatisé -   n’a en tout cas pas manqué de susciter de vives suspicions de la part de tous ceux qui prennent la peine d’analyser froidement tout ce qui se déroule au jour le jour dans ce pays où ce qui vous étonne aujourd’hui est peu de chose par rapport à ce qui survient quelques jours plus tard.

Quoi qu’il en soit la question mérite bel et bien d’être posée : Goukouni Weddeye est-il revenu se reposer définitivement sur la terre de ses ancêtres en attendant que l’Eternel le rappelle ? Est-il rentré au pays comme l’enfant prodigue, fatigué de vivre sous des cieux où il ne sera jamais qu’un has been q ne représentant qu’un certain passé peu glorieux ? A moins qu’il ne soit revenu que pour se mettre tranquillement au service du maître actuel du Tchad qui est en train d’apprendre - - ces derniers temps - à jouer sur tous les registres, surtout lorsqu’il est question de lustrage de son image.

Mais ce qui ne manque pas d’intriguer, c’est la sinueuse dialectique de cet homme qui ne s’est jamais distingué comme un négociateur de talent. Son propre itinéraire politique dit tout de sa réelle capacité à gérer les situations conflictuelles. Mais au-delà, l’homme s’est précipité d’ânonner qu’il ne revient pas au Tchad pour faire de la politique. Une excellente nouvelle, surtout lorsque l’on sait qu’il est politiquement mort, enterré, et oublié politiquement depuis plus de 20 ans.  Mais l’ancien chef de faction politico militaire Toubou est allé plus loin. Pince sans rire, il a ajouté qu’il « est prêt à rencontrer toutes les forces politiques en vue de la recherche de la paix au Tchad ».

Si ce n’est pas de la politique, ça y ressemble étrangement !

Il est vrai qu’au stade où se trouve le Tchad aujourd’hui, avec un dialogue politique complètement constipé du fait du régime en place qui n’entend nullement accorder la moindre concession aux autres acteurs politiques – s’arrogeant de facto le monopole du cœur et du patriotisme – toutes les contributions dans le sens de la concorde nationale sont les bienvenues.

Et si le président Goukouni Weddeye a réellement l’intention – du reste louable – de mettre sa main à la tâche de la décrispation nationale, ce ne pourrait être qu’une bonne chose, et même, c’est le moins qu’on devrait attendre d’un ancien chef d’Etat qui, à une certaine époque, avait donné l’impression de porter le patriotisme en bandoulière. Mais qu’il vienne clamer une chose et son contraire en même temps laisse toute l’opinion perplexe.

Mais pour tout dire, ils sont nombreux au Tchad et en Afrique, les observateurs qui nagent en plein scepticisme. En effet, plutôt que de chercher midi à quatorze heures, beaucoup ont depuis longtemps décrété que le retour de l’ex chef de guerre n’est pas totalement innocent ; et qu’il est plus que probable que l’homme à la barbichette ne serait revenu que pour entrer dans le package de la stratégie globale de lifting médiatico-politique actuellement actionnée par Deby et  son régime, histoire de présenter un faciès plus sympathique à la communauté internationale.

On avait déjà vu le même Goukouni, il y a près d’un an, venir défrayer la chronique au Tchad et se faire recevoir par Idriss Deby. Beaucoup avaient alors cru qu’il avait décidé de s’impliquer dans une option de politique d’apaisement. Mais l’homme s’est plutôt fondu dans la nature après son tête à tête avec le dictateur en place. On ne l’a revu que lors des obsèques d’Omar Bongo à Libreville, versant des larmes de crocodile, non loin de Deby.

Qu’il revienne  donc avec éclat aujourd’hui crever l’écran en affirmant qu’il ne rentre pas au Tchad pour faire de la politique - bien qu’il affiche l’intention de faire des choses ne relevant que de la politique – ressemble fort à de la gesticulation. Ainsi ne serait-il bientôt pas surprenant de voir l’ancien adversaire de Hissein Habré s’époumoner dans les journaux et télévisions d’ici et d’ailleurs pour pratiquer un mauvais exercice de sophisme politique.

De toutes les façons, loin d’intenter un procès à cet ex chef d’Etat, la prudence qui ne nous interdit pas de nous poser des questions nous conseille tout de même de…wait and see !


Par A.K de Ndjamena-matin

Tag(s) : #Politique
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